Croiser un chat noir (associé au diable), passer sous une échelle (en référence à l’échelle utilisée pour descendre le Christ de la croix…) Vous êtes sensible à ces superstitions, vous ? En tout cas, elles font partie de notre culture, et les enfants vous poseront forcément des questions à ce sujet un jour…
“Se montrer superstitieux peut-être un moyen de gérer ses angoisses”
La psychologue Léa Ifergan-Rey : “La superstition constitue un rempart face à une angoisse intérieure. Les êtres humains n’aiment pas le hasard, les choses qu’ils ne comprennent pas ou qui échappent à leur contrôle. Les superstitions, comme les mythes, ont été inventés en partie pour tenter d’expliquer une situation ou un phénomène et en trouver l’origine. On cherche inlassablement à donner du sens, à ce qui n’en a pas forcément. Il s’agirait de trouver du déterminisme à l’extérieur, plutôt que de se dire qu’on est déterminé à l’intérieur. On reporterait sur l’extérieur ce qui nous tracasse à l’intérieur et on le relierait à des éléments concrets.”
“Les enfants très superstitieux sont parfois angoissés”
Léa Ifergan-Rey : “Vers l’âge de 7 ans - on dit d’ailleurs que c’est l’âge de raison - les enfants peuvent devenir plus superstitieux, ainsi que pendant l’adolescence, car ils sont confrontés à plus d’exigences de la part du monde extérieur. Les adultes commencent à les considérer comme des grands, et ils doivent donc apprendre à se contenir. Ils cherchent à leur plaire et à maîtriser leurs pulsions. L’affrontement entre leurs désirs et pulsions d'enfant ou d'adolescent d'un côté, les exigences et les interdits des adultes et du monde social d'un autre ; peut générer une certaine angoisse (tout cela est naturel et n’a rien de pathologique). L’angoisse, contrairement à la peur, ne porte pas sur un objet précis. C’est un sentiment vague et désagréable. Généralement, on a du mal à en trouver l’origine, il est donc plus difficile de la maîtriser. On peut donc rechercher une raison externe pour la justifier.”
“Croire à des superstitions peut aider à maîtriser ses pulsions”
Léa Ifergan-Rey : “La fin de la période dite “œdipienne” (généralement entre 3-4 et 6 ans) se caractérise par le refoulement des fantasmes et le déplacement de ses pulsions au profit de l’apprentissage - ce qui coïncide avec l’entrée en CP qui nécessitera beaucoup d’énergie psychique! Croire ou se créer des superstitions peut aider certains enfants à gérer leurs angoisses. Certaines superstitions peuvent soutenir la volonté, comme se d “Si le feu passe au vert maintenant, je fais mes devoirs directement en rentrant à la maison…” Ce genre de croyance contribue à résister à nos désirs ou à contrôler nos impulsions.”
“Quand la superstition devient trop envahissante”
Léa Ifergan-Rey : “Les comportements superstitieux sont souvent proportionnels à la charge d’angoisse : plus une personne est angoissée, plus elle est susceptible de développer des tics et de se fabriquer des superstitions. Chez l’enfant, si ces comportements superstitieux deviennent problématiques et interfèrent avec son développement, avec le bon déroulement de l’organisation familiale, la scolarité, la socialisation, etc., ne vous privez pas de consulter un professionnel pour trouver l’origine de l’angoisse et aider votre enfant à être plus apaisé.”
Et chez-vous, on est superstitieux ? Racontez-nous en commentaire.