
Pourquoi est-il délicat pour des parents de confier leurs enfants aux grands-parents ?
Il est vrai qu’il y a toujours un peu d’appréhension dans ces cas-là, ne serait-ce que parce que c’est le premier pas vers la séparation. C’est aussi une situation qui réactive notre propre vécu d’enfant : on se demande si nos parents seront meilleurs en tant que grands-parents, s’ils commettront les mêmes erreurs qu’avec nous ou pas, etc. Les adultes peuvent se sentir à la fois épatés et blessés par le rapport que leurs parents entretiennent avec les petits-enfants. Je vois en consultation des gens qui me disent : « Mon père était très sévère avec moi mais il est très souriant avec mes enfants. C’est un père comme ça que j’aurais voulu… » La relation tri-générationnelle pose énormément de questions inconscientes.
Comment préparer au mieux les vacances grands-parents/petits-enfants ?
Au niveau de l’âge, je pense que c’est quelque chose à envisager à partir de 3 ans ; c’est la bonne période pour accepter la séparation. Ensuite, il faut y aller doucement : les parents peuvent éventuellement rester un jour ou deux pour temporiser et roder la relation. Une fois qu’ils sont partis, il peut être utile de laisser la porte ouverte aux contacts en disant par exemple « tu appelleras papa et maman quand tu voudras ».
Du côté des grands-parents, je leur conseille de préparer les vacances pour être le plus disponible possible et pour que les enfants ne s’ennuient pas. Il est essentiel de se mettre d’accord sur une durée qui fait plaisir à tout le monde. Parce que pour les grands-parents, entre la préparation des repas, les activités, le ménage, etc. ce ne sont pas des vacances ! Mon grand-père disait : « les petits-enfants nous font deux plaisirs : quand ils arrivent et quand ils repartent ! » Les adultes confient leurs enfants comme un cadeau. Mais il leur faut accepter que leurs parents ne sont pas forcément comme le modèle de grand-mère qu’ils ont connu. Aujourd’hui, les gens de 60 ou 70 ans sont encore en activité, voyagent, ont des vies amicale et associative riches et certains n’ont pas envie d’être ficelés avec des petits-enfants ! C’est un aspect à prendre en compte.
Faut-il mettre à plat toute l’organisation avec les grands-parents ?
Je ne crois pas que ceux-ci aient besoin ni envie que leurs enfants leur donnent des consignes. Ils peuvent bien sûr baliser ensemble les fondamentaux en terme de santé, de soins et de règles de vie. Mais il faut laisser les grands-parents trouver leurs marques. De toute façon, ils n’en font qu’à leur tête et c’est tant mieux ! Les enfants ont besoin de souplesse. A leur retour à la maison, ils retrouveront leurs repères très facilement.
Par contre, les grands-parents doivent faire attention à ne jamais dénigrer la position parentale, à préserver l’image des parents. Il y a certaines remarques qui peuvent sembler anodines – par exemple dire : « Maman t’oblige à manger tes yaourts sans sucre ? C’est n’importe quoi » – mais elles sont très blessantes pour les enfants. Cela génère des conflits de loyauté chez les plus jeunes.
Quels bénéfices les enfants retirent-ils de ces vacances ?
Les grands-parents sont bien sûr une figure d’autorité et ils sont exigeants sur la politesse et le respect. Mais il n’y a pas les mêmes enjeux éducatifs qu’avec les parents. Ils sont plus disponibles pour jouer, passer des moments privilégiés, répondre aux questions. C’est l’occasion pour les enfants de découvrir la nature et les animaux (surtout s’ils sont citadins), de retrouver leurs cousins, de se détendre, loin de la pression scolaire. C’est un autre mode de dialogue, de relation. Et les enfants sentent bien qu’il y a du plaisir du côté des grands-parents ! Par ailleurs, quand on est avec ses frères et sœurs on a tendance à jouer des coudes pour être le plus admiré, le plus gâté. Il n’y a pas cette rivalité là avec les grands-parents. Les enfants retrouvent une image d’eux-mêmes plus calme. Je me souviens avoir pris quelques jours ma petite fille, seule, chez moi. Elle venait d’avoir des petits frères et sœurs et elle était insupportable. Quand elle était avec moi, elle m’a dit : « Ça fait du bien d’être gentille ».